Je suis fascinée depuis toujours par le langage, par cette capacité d'expression et d'abstraction qui nous fait sortir des murs sensoriels de notre corps tout en y étant originellement ancrée, car le langage est indissociable de la langue, au sens propre comme au sens figuré. Dieu, selon la tradition, est Verbe car il est possible de penser que le langage, d'une certaine façon, transcende nos actions. L'activité de la pensée, mise en oeuvre par le langage, nous fait accéder à l'universel. Est-il raisonnable de réduire le langage à notre corporéité alors qu'il est l'ADN du cosmos et des étoiles et de l'Univers tout entier? E=mc2 est l'expression tellement simple et limpide d'un mécanisme de l'Univers dont Einstein admirait l'intelligence des Lois à l'Oeuvre... Quelle est cette Intelligence qui nous dépasse tellement? Quelle est la nature profonde de ces borborygmes que nous nous adressons et qui sont complètement hermétiques quand nous ne maîtrisons pas la langue utilisée? Lorsque j'entends parler dans une langue qui m'est étrangère, je reste plongée dans un étonnement sans mesure à l'idée que le flux sonore monotone qui s'écoule de la bouche d'un humain est en réalité une fluctuation mélodieuse de sons qui exprime une multitude de variantes d'états mentaux saisis ou ressaisis par la palette infiniment variée des expressions du langage. M'est venue l'idée d'exprimer graphiquement cet étonnement par un jaillissement de lettres qui font système entre elles car elles font partie d'un code, mais qui ne contribuent que progressivement à faire apparaître un sens, qui reste mystérieux...